Pour faire des économies, la DGSE va héberger ses données aux États-Unis
Le vent de privatisation qui frappe le gouvernement français a encore fait des émules. Cette fois-ci, ce sont les services de renseignements extérieurs dont il est question. La quantité astronomique de données avec lesquelles ils travaillent coûtaient trop cher à héberger en France. Le ministre de la Défense a donc décidé de sous-traiter cela à une entreprise américaine.
Une startup de la Silicon Valley, financée par l’armée, a gagné l’appel d’offres
Comme le veut la loi pour l’octroi de contrat public à plusieurs millions d’euros (le montant exact est resté secret mais on sait qu’il est à 6 chiffres), le gouvernement a déposé un appel d’offres. La Commission Européenne et le Département de la Justice américaine ont contrôlé que celui-ci respectait bien le cadre institutionnel et réglementaire. Car le cahier des charges était immense. Trop gros pour le français OVH, pourtant l’un des plus gros hébergeurs d’Europe, qui s’est rapidement retiré.
Finalement, c’est une petite entreprise de Palo Alto, en Californie, qui l’a remporté. L’heureuse élue va donc héberger les millions de téraoctets de données des services de renseignements francais sur ses serveurs informatiques, dans le désert du Nevada. Elle promet que les officiers de la DGSE y auront accès 24 heures / 24 et et 7 jours / 7, malgré la distance. “On va installer une boite noire qui va leur permettre de créer un pont entre leur bureau et nos data centers, comme s’ils étaient dans la pièce d’à côté. C’est une technologie de backdoor (porte dérobée) qui est déjà utilisée depuis des années sur tous les disques durs Intel et les PC Dell”.
En France, certains s’inquiètent de la perte de souveraineté de la DGSE
Cette décision fait des émois dans l’Hexagone. Alors qu’on s’extasiait encore devant les promesses d’un cloud souverain à la française, cela vient mettre à mal les ambitions de la France en la matière. Mais comme l’indique le gouvernement, ce sont deux choses différentes : “Il ne faut pas confondre les données domestiques, à destination des entreprises de l’intelligence artificielle, et celles destinées à vous surveiller. Ce sont deux entités différentes, un peu comme le Réseau Ferré de France et la SNCF” nous a expliqué Bruno Le Maire, avant de conclure, d’un ton dédaigneux : “De toute façon, vous pouvez pas comprendre, vous : la privatisation et le démantèlement de services publics, c’est un métier!”
L’entreprise américaine, elle, promet qu’elle n’a pas eu à avoir recours à l’extraterritorialité du droit américain pour obtenir ce juteux contrat. Si elle a menacé OVH, alors en pole position pour gagner l’appel d’offre, de les traîner en justice pour corruption, elle assure que c’était pour une bonne raison et que ce n’avait rien à voir avec Alstom. De plus, le fait que cette start-up soit financée par le Pentagone ne remet aucune en doute l’indépendance de la DGSE.
Néanmoins, si vous souhaitez conserver un certain droit de regard sur l’utilisation de vos données personnelles (et ne pas les offrir aux États-Unis), on vous recommande quand même d’utiliser le moteur de recherches français Qwant… et d’éviter d’utiliser FaceApp.